La médecine africaine connaît la contagiosité de la lèpre, de même que la complexité de ses manifestations. Elle déploie ses efforts thérapeutiques en de multiples directions. Des traitements sont disponibles pour toutes les formes de lèpre, toutes les lésions et désordres, y compris les troubles psychiques.
De nombreuses médications administrées par voie interne et externe permettent de s’adapter aux situations cliniques. Il est remarquable aussi que des traitements spéciaux aient été élaborés pour les femmes enceintes et que les enfants bénéficient de traitements curatifs et préventifs.
La maîtrise de toutes ces thérapies nécessite une longue formation, ainsi que des connaissances approfondies sur les vertus des plantes, les associations synergiques et complémentaires, les propriétés nouvelles conférées par certaines associations ou certains modes de préparation.
Le rétablissement d’un organisme, souvent très éprouvé et porteur de lésions graves, demande de la part du praticien et du patient une longue persévérance. Mais au terme de ces efforts, la santé revient, l’aspect physique est transformé, une vie normale peut être envisagée. Ces réalités ont été observées maintes fois à l’Hôpital Traditionnel de Keur Massar.
Les étapes de la thérapie
La thérapie antilépreuse se déroule en plusieurs étapes :
1 – Le traitement d’attaque
Il comporte une forte purgation contrôlée dont le but est l’élimination des toxines bactériennes et tissulaires accumulées au cours de la longue incubation puis de l’évolution de la maladie. Elle est arrêtée le moment venu, à l’aide d’un verre d’eau fraîche.
2 – Le traitement préliminaire
Il comprend des préparations toniques destinées à relever l’état général. Il est de courte durée mais porte rapidement des fruits.
3 – Le traitement de fond
Il s’effectue avec un changement périodique de médications, environ tous les six mois. On évite ainsi toute accoutumance des germes et les patients sont encouragés par le changement de goût des médicaments. En particulier, au Sénégal, avec la saison des pluies, apparaissent pour une courte durée des plantes herbacées antilépreuses qui entrent alors dans des compositions nouvelles.
4 – Le traitement final
Il est destiné à consolider les traitements acquis.
5 – Le traitement de sécurité
De courte durée, pour éviter les risques de rechute, il met fin à la thérapie.
Les actions des préparations médicamenteuses
Les préparations médicamenteuses agissent sur l’agent pathogène et tous les aspects de la maladie lépreuse. Elles assurent aussi l’élimination des toxines, ce qui évite le risque des « réactions lépreuses ».
Leurs vertus sont les suivantes :
- action antimycobactérienne
- action tonique
- action dépurative
- affaissement des lépromes
- recoloration des taches cutanées
- normalisation de la peau (très rugueuse)
- disparition des paresthésies
- retour progressif de la sensibilité cutanée au froid, au chaud, au tact, à la douleur
- régression partielle des paralysies et récupération progressive d’un bon tonus musculaire
- action antinévrite
- disparition des oedèmes
- guérison des ulcérations
- amélioration des lésions osseuses
- prévention des mutilations
- prévention des réactions lépreuses
- cicatrisation des maux perforants plantaires
- traitement des troubles psychiques
Ce bref exposé permet d’appréhender la richesse des traitements antilépreux de la médecine traditionnelle au Sénégal et leurs réponses aux différentes manifestations de la maladie.
Une question vient à l’esprit : quelle est l’origine de ces vastes connaissances dont la perfection ne peut que surprendre ?
Dr Yvette Parès, le 17.09.2009
Professeur à l’Université de Dakar de 1960 à 1992
Dr ès-science
Dr en médecine
Directrice du centre de recherches biologiques sur la lèpre de 1975 à 1992
Directrice de l’Hôpital Traditionnel de Keur Massar (Sénégal) de 1980 à 2003