Au cours du 20e siècle, les pays d’Occident ayant puissance sur le monde ont créé des institutions sanitaires internationales où seule a été admise la médecine «scientifique ». Selon les conceptions de l’époque, ce caractère lui conférait une incontestable supériorité. Les autres médecines, élaborées sur des bases différentes, ne pouvaient être que négligées.
C’était oublier que science et thérapeutique ne sont pas obligatoirement liées et que les traitements ne montrent leur vraie valeur qu’après avoir subi l’épreuve du temps.
D’autre part, les connaissances scientifiques, aussi vastes qu’elles puissent paraître, ne sont que des îles parsemées dans l’immense océan de l’Inconnu. Avancer, en les ignorant, dans ces zones lacunaires conduit aux plus grands déboires. L’antibiothérapie, l’hormone de croissance, les thérapies géniques en offrent des exemples.
Il n’a fallu que quelques décennies pour mettre en évidence les faiblesses et dangers des traitements prescrits par la médecine mondialement imposée.
Ses ambitions, louables au départ, lutter contre les grands fléaux sanitaires anciens ou de survenue récente, après des succès éphémères, n’ont connu que l’échec. Tuberculose, paludisme en particulier, loin d’être maîtrisés, ont été aggravés par l’apparition des résistances et multirésistances. Leur caractère pathogène s’est considérablement accru.
Il en est de même pour les affections bactériennes revenues en force et contre lesquelles on n’oppose que des armes émoussées.
L’épreuve du temps a montré encore, outre les effets indésirables immédiats, les graves désordres que pouvait entraîner ultérieurement la prescription des molécules issues de la chimie et qui ont nécessité les retraits de la vente.
Mais un autre élément, de détection récente, vient encore assombrir le tableau. Il s’agit du caractère polluant des médicaments chimiques qui ont corrompu l’eau jusqu’aux réserves souterraines.
Le constat préoccupant appelle la réflexion. La médecine officielle peut-elle continuer à gouverner seule la politique sanitaire mondiale? Les erreurs accumulées donnent elles-mêmes la réponse.
Deux attitudes sont à envisager:
D’une part, la médecine scientifique devra impérativement réorienter sa thérapeutique et s’éloigner du « tout-chimie ». Elle sera contrainte de revenir aux ressources sous-estimées et qualifiées improprement « d’empiriques », celles qu’offre en abondance la nature avec ses flores médicinales très diversifiées.
D’autre part, un comportement nouveau vis-à-vis des médecines traditionnelles pratiquées sur les autres continents s’avère indispensables.
Elles détiennent un vaste patrimoine thérapeutique accumulé depuis des origines incertaines.
A titre d’exemple, la médecine chinoise, selon les écrits, dispose de plus de
100 000 formules médicamenteuses. Les médecines africaines sub-sahariennes, si l’on en juge par la médecines traditionnelle du Sénégal possèdent sans doute, elles aussi, un nombre impressionnant de médications pour les maladies des plus bénignes aux plus sévères.
La mobilisation de tous les savoirs médicaux de la planète apparaît comme la solution d’avenir et qui apporterait un changement profond et bénéfique dans la situation sanitaire mondiale.
Un premier appel visant cette collaboration avait été lancé en 1991 à New York par Boutros Boutros Ghali, alors secrétaire général des Nations-Unies. Il avait prononcé son discours lors de la VIe journée mondiale du sida. Mais trop en avance sur son temps, l’appel ne fut pas entendu au Nord comme au Sud. S’il avait été suivi, la situation sanitaire à travers le monde aurait été profondément modifiée et le sida serait peut-être en voie d’être maîtrisé.
Mais les difficultés qui ne cessent de s’accumuler vont sans doute conduire à l’ouverture des esprits, à une vision lucide des réalités. On peut espérer que la rencontre des médecines, valeurs culturelles de tous les peuples, s’accomplira dans un avenir qui pourrait être non lointain.
Dès lors, une nouvelle Organisation Mondiale de la Santé serait à même de voir le jour pour une efficacité toujours accrue dans les combats visant les grands fléaux qui affligent l’humanité.
Un autre aspect mérite d’être retenu. Tous les peuples se sentant valorisés, un grand pas serait fait vers la paix.
L’union de toutes les intelligences, de tous les savoirs, de tous les coeurs, ne serait-elle pas la meilleure des mondialisations?
Août 2009
Dr Yvette Parès
Professeur à l’Université de Dakar de 1960 à 1992
Dr ès-science
Dr en médecine
Directrice du centre de recherches biologiques sur la lèpre de 1975 à 1992
Directrice de l’Hôpital traditionnel de Keur Massar (Sénégal) de 1980 à 2003